De retour en pleine forme? [Pv Riley N.][Fini]

Après de la fatigue générée par des cauchemars, du stress et la déroute entre mon passé et le présent, j'étais tombée malade. C'est arrivé alors que je venais de croiser Kris-kun et Nicholai-san sans le jardin, après avoir fait un sieste dans l'herbe. Suite à cela, j'ai dû rester à l'infirmerie quelques temps. Ce n'est qu'après qu'on soit assuré que j'allais bien mieux, du moins que je ne faisais plus de mauvais rêves à peine les yeux fermés, qu'on me laissa rentrer dans la maison Saphir. Nous étions en fin de semaine et j'étais presque certaine de ne rencontrer personne à cette heure-là, mis à part les sécheurs de cours et les personnes n'en ayant pas.

Tranquillement, sans me presser, je traversais les couloirs déserts. De temps à autres, je passais devant des salles animés par des cours divers et variés. Qu'allait-il se passer lorsque je retournerais en classe? Afin de ne pas trop réfléchir à cette question, je me remémorais mon arrivée à l'infirmerie, lorsque Kris-kun m'avait joué de la guitare. Et Nicholai-san qui m'avait tenu la main... Mais que ressentait-il donc pour moi? S'il s'agissait d'amour, il serait déçu puisque mon coeur appartenait déjà à Narudgi-kun. En pensant à lui, je souris en joignant mes mains sur ma poitrine. J'étais heureuse qu'il soit venu me rendre visite pendant ma convalescence.

Alors que je me rappelais tous les moments que j'avais passé en compagnie de mon petit ami, j'arrivais devant la porte de la maison Saphir. Je fus surprise de voir que je ne m'étais pas perdue comme d'habitude, même en ne faisant pas attention. Peut-être était-ce parce que c'était un endroit qui ne changeait jamais. Je souris du comique de la situation, et entrai dans la salle commune de ma maison. Une fois encore, je découvris les lieux. C'était comme si j'avais tourné une page importante. J'avais compris que je n'irais plus jamais dans la cage, même si une douleur persistait.

Comme j'étais un peu fatiguée, je m'installai confortablement dans un des fauteuils et ne fis plus rien. Je ne voulais plus bouger. Pas même pour aller chercher un livre dans ma chambre, ou bien même pour m'allonger dans ma chambre. Non, ce n'était pas utile. Cette pièce était agréable et, surtout, il fallait que je commence à m'y habituer.

Cela faisait quelques jours que je n'avais plus vu Yumiko et je me demandais où elle pouvait bien être. J'avais ouïe dire qu'elle était malade, mais ne sachant pas si cela était la vérité, je n'avais pas pris la direction de l'infirmerie. Depuis, je l'attendais chaque soir sur un canapé du dortoir, mon carnet, un crayon et un livre avec moi. Je veillais jusqu'au couvre feu, puis je montais dormir.

Aujourd'hui j'avais finis plus tôt que d'habitude et cela m'arrangeais sensiblement : j'avais contrôle le lendemain et je voulais réviser encore un peu. Je posais donc mes affaires de cours sur mon bureau et pris celles pour réviser puis descendis au salon comme à mon habitude. Je repassais mes leçons pendant une bonne heure avant de remonter changer mes leçons pour mon carnet et un crayon. En redescendant une fois de plus, je me perdais dans mon monde, marchant alors en mode automatique.

J'accompagnais une jeune fille aux cheveux rouges sur un bateau. Elle me semblait familière. Mais oui, c'est une des deux filles que j'avais rencontré avant de dessiner Yumiko et trois autres personnes vers le Hall, il me semble. Le trajet en bateau passa relativement vite alors que je savais qu'il fallait pas mal de temps normalement. La jeune fille aux cheveux rouges me guida avec hésitation sur l'île, sûrement parce que ce n'était que sa deuxième visite. Nous étions dans une ville assez grande et alors que nous traversions une rue pour aller dans une boutique...

La bulle éclata avec une lumière étrangement familière qui m'avait particulièrement manqué : celle de Yumiko. Elle avait dut arriver alors que j'étais à l'étage. Je quittais mon monde et réintégrais la réalité assez rapidement ce qui me troubla légèrement. Je m'assis à ses côtés.

- Salut... Je n'étais pas vraiment à l'aise, de quoi devrais-je parler ? C'est vrai que.... Non... Comment tu vas ?

J'avais entendu dire que demander l'état de santé de son interlocuteur était plus poli que de rentrer directement dans le vif du sujet. Et comme je disais souvent : la politesse permet d'éviter les ennuies.

Je sentis, plus que je ne vis, quelqu'un s'asseoir près de moi. Quand je ramenai mon esprit et mon attention sur ce qui se passait autour de moi, je vis qu'il s'agissait de Riley-chan accompagnée de son carnet et ses crayons. Bien qu'honteuse, je lui souris gentiment. J'étais vraiment contente de la voir. Elle m'avait manquée. Je m'installais de façon à lui faire face. Elle semblait contente de me voir... et inquiète. Peut-être n'était-elle pas vraiment au courant de se qui m'était arrivé? Mes soupçons commencèrent à se confirmer lorsqu'elle me salua, mal à l'aise :

- Salut... C'est vrai que.... Non... Comment tu vas ?

Je lui souris. J'étais un peu fatiguée. Mais pas autant que lorsqu'on m'avait amenée à l'infirmerie. Je ne voulais pas l'inquiéter, mais ne pas lui parler de ce qui m'était arrivé pouvait provoquer cette réaction. D'un autre côté, ce pouvait ne pas être le but de sa question. Alors, je décidai de m'en tenir à ce qu'elle m'avait demandé :

- Je me sens encore un peu fatiguée, mais ça va. En tout cas, mieux qu'il y a quelques jours. Et toi?

Bon, d'accord, je lui avais tendu une petite perche au cas où mes soupçons soient exacts. Je m'inquiétais aussi pour elle : j'espérais qu'elle allait bien, qu'elle n'avait pas d'ennuis. Quoi que, pourquoi serait-ce la cas? Des ennuis similaires aux miens? Plus probable qu'autre chose.

Elle s'installa fasse à moi puis me sourit mais j'y vis de la fatigue. Ce que j'avais entendu était-il vrai ? Elle ne me dit rien, répondit juste ce qu'il fallait à ma question :

- Je me sens encore un peu fatiguée, mais ça va. En tout cas, mieux qu'il y a quelques jours. Et toi ?

Juste ce qu'il fallait pour m'alarmer un peu. "mieux qu'il y a quelques jours" ? Ce que j'avais entendu était vrai ? Dans tous les cas, mieux valait s'en assurer. Je posais mes affaires de dessin sur la petite table basse devant le canapé avant de me repositionner face à sa personne. Je ne la regardais pas vraiment dans les yeux lorsque je lui répondis :

- Moi, ça va. Je... j'ai entendu comme quoi tu... tu étais à l'infirmerie ces derniers jours. Est-ce...

Si c'était vrai, je ne méritais sûrement pas sa gentillesse pour ne pas être aller la voir. J'hésitais alors à lui poser la question. Je voulais savoir, mais paradoxalement, si je savais, ne serait-ce pas pire ? Je commençais à angoisser intérieurement et comme à mon habitude, je le cachais assez bien. Je repris la parole tandis que l'une de mes mains disparut brièvement sous le coup de l'angoisse.

- Est-ce que c'était vrai ?

Après avoir posé ses affaires sur la table basse, devant le canapé, elle me fit face et me répondit :

- Moi, ça va. Je... j'ai entendu comme quoi tu... tu étais à l'infirmerie ces derniers jours. Est-ce...

Je fus contente qu'elle saisisse la perche que je lui avait tendue. Pour moi, cela signifiait qu'elle se souciait de moi. C'était si important pour moi que je ne pouvais que l'en remercier de tout mon coeur. Mais pourquoi faisait-elle donc une pause? Pourquoi ne finissait-elle pas sa question? Pourquoi était-elle si hésitante?

- Est-ce que c'était vrai ?

Une de ses mains avait disparues et je savais que cela signifiait qu'elle était angoissée. Mais pourquoi l'était-elle? Il n'y avait pas de quoi! Avec un sourire plein de gentillesse, je m'approchai d'elle et posai doucement mes mains sur les siennes. C'est ainsi que je lui répondis :

- Oui, c'est vrai.

Je réfléchis quelques secondes avant de décider de lui raconter ce qu'il s'était passé :

- Je ne sais pas si on te l'as dit, cela fait un moment que je ne dormais pratiquement plus à cause de cauchemars. Du coup, il y a quelques jours, je me suis écroulée... fiévreuse et complètement épuisée, dans le jardin. Heureusement, j'étais avec Kris-kun et Nicholai-san. Ce sont eux qui m'ont emmenée à l'infirmerie.

Je fis une petite pause pour qu'elle ait le temps d'assimiler ce que je venais de lui raconter. Puis, je rajoutai sur un ton à la fois sérieux et attristé :

- Il y a une possibilité pour que le stress que je ressens depuis la sortie de ma cage soit une des causes de mes cauchemars... cela a généré tant de chose en réalité...

Je la regardai et lui souris pour lui signifier que ça allait bien désormais. Mais allait-elle le comprendre ou bien s'attacherait-elle à ce qui s'est passé?

Elle ne m'en voulait même pas. Je n'étais pas allée la voir et elle ne m'en voulait pas. Et c'était vrai, cette histoire d'infirmerie. Elle me prit la main en souriant avant de m'expliquer ce qu'il s'était passé :

- Je ne sais pas si on te l'a dit, cela fais un moment  que je ne dormais pratiquement plus à cause de cauchemars. Du coup, il y a quelques jours, je me suis écroulée... fiévreuse et complètement épuisée, dans le jardin. Heureusement, j'étais avec Kris-kun et Nicholai-san. Ce sont eux qui m'ont emmenée à l'infirmerie.

Elle fit une pause, sûrement pour que j'enregistre correctement ce qu'elle venait de dire. Kris et Nicholai ? Je ne les connaissais pas mais je les remerciais intérieurement pour avoir emmené Yumiko à  l'infirmerie. Je n'osais pas vraiment imaginer ce qu'il se serait passé si elle était restée inconsciente dans le jardin. Elle reprit, un air grave et triste en même temps :

- Il y a une possibilité pour que le stress que je ressens depuis la sortie de ma cage soit une des causes de mes cauchemars... cela à généré tant de choses en réalité...

À la fin de sa tirade, elle me sourit, comme pour me rassurer et me dire qu'elle allait bien. Je voyais tout de même la fatigue dans ses cernes mais ne fis aucun commentaire. Ce qui est fait, est fait. On ne peut pas remonter le temps pour changer le cours des choses. Une question restait pourtant dans mon esprit.

-  Est-ce que tu fais encore des cauchemars de ce genre ?

Je savais ce que cela faisait de faire des cauchemars sur les choses traumatisantes qui nous étaient arrivées. J'en avais tellement fais à l'hôpital et à mon arrivée à l'orphelinat que j'en avais peur de dormir. À la place, je lisais et dessinais avant de tomber d'épuisement. C'était Lewis qui me ramenait dans ma chambre. Il me disait de ne plus recommencer, qu'il ne serait pas aussi gentil la prochaine fois, mais il le faisait quand même.

- Est-ce que tu fais encore des cauchemars de ce genre ?

Je ne savais pas quoi lui répondre. Grâce au soutien de Narudgi-kun, Kris-kun et Nicholaï-san (qui l'aurait cru), j'avais réussis à dormir sans faire de mauvais rêves. Enfin... après le jour de mon arrivée à l'infirmerie. En me rappelant les images angoissantes que j'avais faites, je perdis mon sourire, le troquant avec l'air triste que j'avais voulu abandonner.

En me rendant compte que je ne lui avais pas répondu, je réfléchis de nouveau puis lui dit, honteuse :

- Pour te dire vrai, je ne sais pas... Mais certainement beaucoup moins que ce que je faisais. Enfin, je crois...

Mouais, autant dire que je ne sais pas, ça aurait été plus rapide, non? Désespérée par moi-même, je m'écroulai sur l'accoudoir du canapé et repris mon observation du plafond, qui d'ailleurs était mille fois plus beau que celui de ma cage.

Comme je m'en voulais de rester sur cette phrase, je rajoutais, toujours dans cette position ridicule :

- Depuis ma sortie de ma cage, la liste des nouvelles expériences est longue : possibilité de parler, être parmi des dizaines de personnes, participer des à des cours, posséder des activités autres qu'écouter les oiseaux... Dans mes cauchemars, je suis de retour dans ma prison... et, je te vois, je vois aussi toutes les personnes que j'apprécie ici... sans possibilité de communiquer avec vous.

J'avais terminé un peu rapidement car c'était encore effrayant et douloureux. Et ma plus grande peur était que ça recommence. Que ce soit en tant que cauchemar ou dans la réalité.

Elle ne dit rien pendant un moment avant de prendre un air triste et de me dire :

- Pour te dire vrai, je ne sais pas... Mais certainement beaucoup moins que ce que je faisais. Enfin, je crois...

Elle ne savait pas vraiment. En même temps, je ne savais même pas si elle avait passé une nuit hors de l'infirmerie, voir même seule. Elle s'avachit contre l'accoudoir du canapé sur lequel nous étions assise puis contempla le plafond comme s'il contenait toutes les réponses de l'univers. J'y jetais un coup d'oeil mais n'y trouvais rien de vraiment particulier. Ou peut-être que... non. Mon côté réaliste ne s'entendait pas vraiment bien avec son antithèse, mon côté artistique. Lorsque cela arrivait, ils me faisaient pondre des choses vraiment... horribles.

La réflexion de Yumiko s'interrompit, elle prit la parole, brisant mes divagations. Je l'écoutais attentivement. À croire qu'ils déteignaient encore sur moi après tout ce temps.

-  Depuis ma sortie de ma cage, la liste des nouvelles expériences est longue : possibilité de parler, être parmi des dizaines de personnes, participer des à des cours, posséder des activités autres qu'écouter les oiseaux... Dans mes cauchemars, je suis de retour dans ma prison... et, je te vois, je vois aussi toutes les personnes que j'apprécie ici... sans possibilité de communiquer avec vous.

Ne pas pouvoir communiquer... N'y avait-il qu'un seul moyen de communication ? Yumiko devait se servir de se qu'elle avait appris ici pour sortir de son cauchemar. Sinon, elle resterait prisonnière de son rêve indéfiniment. Pourquoi ne pas la mettre sur la piste ? Il fallait qu'elle fasse le chemin seule, certes. Mais j'avais bien le droit de parsemer ce chemin d'indice.

- Tu sais... en arrivant ici, tu as du apprendre pas mal de chose, comme nous tous, sur les sentiments, les passions, entre autres. Sur la table basse de ton ancien "chez toi" il y a un carnet il me semble. Il devrait y avoir un crayon avec. Si il n'y en a pas... tu n'as qu'à t'en créer un. Ce n'est qu'un rêve et c'est ton rêve.

Je ne suis pas la bonne personne pour donner des conseils. Mais se sortir d'un cauchemar ? Je l'avais fais tellement de fois...

- Tu sais... en arrivant ici, tu as dû apprendre pas mal de chose, comme nous tous, sur les sentiments, les passions, entre autres. Sur la table basse de ton ancien "chez toi" il y a un carnet il me semble. Il devrait y avoir un crayon avec. Si il n'y en a pas... tu n'as qu'à t'en créer un. Ce n'est qu'un rêve et c'est ton rêve.

Elle m'avait dit ça après un petit temps que je pensais être de réflexion. Et, cette fois, ce fut à moi de méditer, toujours dans ma contemplation du plafond. Un chemin se fit entre les mots qu'elle avait prononcés, mais il était trop flou. Je fermais donc les yeux un instant, puis je sus de quel carnet elle voulu parler. Je me mis donc à éclater de rire. Je ne me moquais pas d'elle. J'avais compris qu'elle me donnait une piste : écrire pour communiquer. Je pensais alors que nous ne nous étions mal comprise. Je me calmai donc avant de lui dire en ressuyant les larmes qui avaient coulées pendant que je riais :

- Escuses-moi, Riley-chan. Mais je crois que je me suis mal exprimée...

Je repris mon souffle puis repris, le sourire aux lèvres qui était là suite à mon fou rire, mais une expression pareille à celle que j'avais pendant ma première explication :

- En réalité, quand je disais que je ne pouvais pas communiquer avec vous,... c'est parce que vos ne répondiez pas à mes appels à l'aide.

Je baissais la tête une dizaine de secondes avant de regarder le carnet de Riley-chan. Répondraient-ils réellement si j'écrivais au lieu de hurler à pleins poumons? Et, étions-nous maîtres de nos rêves?

- Je pense qu'au lieu de changer mon rêve, fis-je à mon amie, il serait peut-être plus efficace que je me convainc que je ne retournerais plus jamais là-bas.

Je ne pris pas en compte son rire, elle ne semblait pas se moquer de moi, ce qu'elle confirma par la suite en m'affirmant que je faisais fausse route. Elle baissa la tête, comme si elle réfléchissait, un instant avant de reprendre la parole.

- Je pense qu'au lieu de changer mon rêve, il serait peut-être plus efficace que je me convainc que je ne retournerais plus jamais là-bas.

Je méditais à mon tour à ses paroles, tout en m'enfonçant dans le dossier du canapé. Se convaincre ? Cela me faisait penser à quelque chose... Une sorte d'hypnose ? Mon esprit réaliste n'y croyait pas plus que ça, de plus, il me semblait que l'hypnose avait un effet limité. Comment se convaincre qu'on ne retournera plus jamais dans un endroit ? Jusqu'à l'arrivée de Yumiko dans ma vie, une partie de moi était restée... là-bas, dans ce village africain, et même si elle en avait ramené un morceau, je savais que d'autres y étaient encore. Mes cauchemars avaient peut-être cessé, du moins, de ce que je me souviens, mais je ne me sentais pas encore tout à fait... moi.

Je n'avais pas de réponse à lui donner, pourtant je voudrais l'aider. Vraiment. Mais je ne pouvais même pas m'aider moi, n'était-ce pas pour cela que je m'étais créer un monde intérieur ? Pour se convaincre de quelque chose, il faut y croire et se le répéter encore et encore. Il faut s'y accrocher, sinon, tous les efforts fournis ne serviraient à rien. Et si on y arrive pas, il faut trouver quelqu'un qui y croit autant que soi et qui le répéterait encore et encore. Il faut...

- ...une motivation. Murmurais-je, toute à ma réflexion.

Je ne compris pas ce qu'elle me dit. D'ailleurs, était-ce à moi qu'elle parlait. Et si c'était le cas, qu'est-ce qu'elle avait donc voulu dire? "Motivation"... Quelle était la définition de ce mot?

- Nom féminin signifiant... Hum... ce qui pousse à agir?

Je mis ma main sur mon menton et fermai les yeux. Qu'est-ce qui pouvait me "pousser à agir" pour éviter les cauchemars? Je réfléchis quelques minutes, mais je me rendis compte de quelque chose. A chaque fois que je me posais la fameuse question, le visage de Narudgi-kun s'imposait à moi en même temps que notre entrevue à l'infirmerie, après que je me sois évanouie dans le jardin de l'Académie.

Découragée, je m'affalais à nouveau dans le canapé. Un petit sourire se dessina sur mes lèvres malgré tout ce qui se passait. En réalité était que ma peur était présente. Puis, je compris. Je compris que j'avais peur qu'on ne me retienne pas si je devais quitter l'Académie. Je tournai donc la tête mon amie et lui demandai, les larmes aux yeux :

- Et si ma "famille" venait me récupérer pour me remettre dans ma cage? Ou si, quand je devrais quitter l'Académie, on m'y enfermait à nouveau? Est-ce que tu m'aiderais?

Je voulais croire que la réponse serait oui. Je voulais croire que mes liens avec mes amis seraient plus forts que la notoriété de ma famille.

Je ne m'étais pas rendu compte que j'avais parlé à voix intelligible et avais donc continué mes réflexions. Qui pouvait remplir ce rôle de ''motivation'' pour Yumiko ? Je ne connaissais pas autant de monde qu'elle mais... Narudgi ! C'était évident !

Elle se tourna vers moi, les yeux soudain embués de larmes qui menaçaient de couler à tout instant. Que... ?

- Et si ma "famille" venait me récupérer pour me remettre dans ma cage ? Ou si, quand je devrais quitter l'Académie, on m'y enfermait à nouveau ? Est-ce que tu m'aiderais ?

Elle avait parlé à toute vitesse et je sentais qu'elle allait bientôt pleurer. Je détestais l'idée. J'avais compris en gros ce qu'elle craignait. Que sa famille la remette en cage et que ses amis et moi ne l'aidions pas. Ce qui était totalement idiot, n'est-ce pas ? Si sa famille avait accepté de l'envoyer ici, c'est qu'ils ne la voulait plus chez eux. Et puis même. Yumiko était devenue assez chère pour que je ne la laisse pas tomber comme ça.

Que de belles pensées pour une personne qui n'était même pas allée la voir à l'infirmerie. Je lui fis tout de même mon faux sourire, espérant la rassurer, avant de répondre.

- Ce que tu dis n'a strictement aucun sens. Tu ne dois pas douter. Je te fais confiance, tu me fais confiance, je pense, il n'y a rien à rajouter.

Ce n'est qu'à ce moment là que je me rendis compte que ce que je disais, je le pensais vraiment. Je faisais confiance à Yumiko. Je ne la lâcherais pas comme ça à ses tyrans de parents.

Riley-chan me sourit et tenta de me rassurer :

- Ce que tu dis n'a strictement aucun sens. Tu ne dois pas douter. Je te fais confiance, tu me fais confiance, je pense, il n'y a rien à rajouter.

En l'écoutant, je me rendis compte que ce qu'elle venait de me dire correspondait à la réaction qu'avait eue Narudgi-kun et je m'en voulu. Elle avait raison. Il fallait que je fasse un peu plus confiance aux personnes que j'appréciais, aux personnes qui m'appréciaient en retour. En regardant à nouveau autour de moi, je me rendis enfin réellement compte que ma vie ne serait plus jamais pareil et que je ne devais pas en avoir peur. Je soupirai alors, un sourire aux lèvres et une larme de soulagement roulant sur ma joue :

- Tadaima... Puis en me tournant vers ma meilleure amie, je lui fis : Tu as raison, c'est ici ma maison à présent. Je me suis peut-être fait du mouron pour rien. Enfin, je m'approchai d'elle et la prit dans mes bras, Merci pour tout, Riley-chan. Arigato!

Tout en la remerciant en japonais, je la serrai encore plus fort. J'étais réellement heureuse d'avoir des amis et de pouvoir vivre enfin. Et, plus encore, j'étais comblée de voir qu'ils m'acceptaient comme j'étais. Pour tout cela, je remerciai toutes les divinités possibles et imaginables, les personnes réelles qui m'entouraient et je bénis mon pouvoir tout en maudissant, encore et toujours, ma faiblesse. Ensuite, je lâchai Riley-chan et lui demandai en souriant :

- Je suppose qu'il va me falloir un peu de temps avant de ne plus faire de cauchemars?

A mes paroles, elle regarda autour de nous, semblant imprimer le décor dans sa mémoire. Je me demandais si je n'y avais pas été un peu fort puisqu'une larme coula, avant qu'elle ne dise :

- Tadaima...

Je ne compris pas ce que cela voulait dire mais comme elle reprit, je classais ça comme "langue étrangère à apprendre".

-Tu as raison, c'est ici ma maison à présent. Je me suis peut-être fait du mouron pour rien.

Là, elle me prit dans ses bras. Décidément, j'ai l'impression que cela devenait une habitude. Une habitude qui, contrairement à ce que je supposais, ne me dérangeais pas. Alors je passais mes bras autour d'elle à mon tour.

- Merci pour tout, Riley-chan. Arigato!

Elle me sera plus fort encore, mais je ne dis rien malgré le fait que j'avais besoin de respirer. En plus, ses satanées branchies ne fonctionnaient que dans l'eau. Mais j'avais encore de la réserve, alors je ne me plaignis pas, me contentant de l'écouter et d'essayer de deviner ses pensées. L'avais-je convaincu qu'elle ne retournerait pas là-bas ? Etait-elle sûre à présent que nous l'aiderions en cas de problème ? Je l'espérais, tout autant que j'espérais qu'elle me fasse confiance et que notre amitié dure. Au bout d'un certain moment, elle me relâcha et me demanda :

- Je suppose qu'il va me falloir un peu de temps avant de ne plus faire de cauchemars ?

Oui ? Non ? Peut-être ? Tout dépendait du mental de la personne et tout le monde est différent. Il n'y a pas d’algorithme précis, pas de manière évidente. Pourtant, je lui répondis :

- Eh bien, je suppose. Tu peux venir me voir si tu en fait. N'hésite pas à me réveiller.

Me réveiller ? Je ne dormais pas beaucoup, et seulement d'un œil et sur une oreille. Ce n'est sûrement pas elle qui allait déranger mon sommeil. Je lui souris avec ce faux sourire constituer de toute pièce quand même.

Je fus à la fois très contente, soulagée et effarée par la réponse de Riley-chan :

- Eh bien, je suppose. Tu peux venir me voir si tu en fait. N'hésite pas à me réveiller.

La réveiller?! Déjà que je n'osais pas toujours parler aux personnes éveillées, alors réveiller quelqu'un... Quoi qu'on me dirait que je réveillais déjà pas mal de monde en hurlant après chacun de mes cauchemars. Et si ce n'était pas le cas, c'est que tout le monde avait un sommeil bien lourd. Ils ne devaient pas faire de mauvais rêves, eux. A cette idée, un sourire étira mes lèvres. Du coup, je tentai de plaisanter :

- Au pire, si tu entends hurler c'est que c'est moi qui ai fait un cauchemar. Puis, je repris plus sérieusement : Sinon, que je sache, tu es dans quelle chambre?

Je m'adossai ensuite entre l'accoudoir et le dossier du canapé, ramenai mes jambes contre moi et posai ma tête. Je sentais mes yeux se fermer sans pour autant ressentir une grande fatigue m'envahir. Je tentai pourtant de rester éveillée pour écouter la réponse de mon amie. Ce fut une tâche bien compliquée. Tellement compliquée que, finalement, je m'endormie un instant.

Je ne savais pas où je me trouvais. Je courais à la recherche de quelqu'un. Mais qui? Je ne le savais plus. Peu de temps passa avant que je trouve une personne qui m'était familière. Elle me ressemblait, mais pas entièrement. Elle me parla. Je ne l'entendis pas. Pourtant je compris.

Je me réveillai en sursaut J'avais la respiration saccadée et je cherchai ma sœur du regard. Mais je ne vis que Riley-chan. Soulagée, je me calmai, me laissai retomber sur le canapé et souris timidement à mon amie.

Me réveiller lui semblait une tâche improbable. C'était compréhensible, réveiller quelqu'un peut vite se révéler... dangereux selon la personne que l'on réveille. De plus, c'est une forme de non-respect et d'impolitesse. Mais moi... je ne dormais pas beaucoup. Yumiko me répondit pourtant :

- Au pire, si tu entends hurler c'est que c'est moi qui ai fait un cauchemar.

Je grimaçais intérieurement. Déjà qu'elle répugnait rien qu'à l'idée de me réveiller mais si en plus elle hurlait à chaque cauchemars, je n'imaginais même pas sa gêne. Elle prit un air plus sérieux en continuant :

- Sinon, que je sache, tu es dans quelle chambre ?

Je n'hésitais pas à lui répondre, c'était une question simple, directe et c'était moi qui lui avais proposé :

- C'est la 4F.

Puis je me rendis compte qu'elle somnolait. Ses yeux s'agitaient, signe d'un rêve particulièrement dérangeant. Elle se réveilla en sursaut, respirant fort et par saccade. Je ne sursautais pas, j'avais supposé que son rêve et son léger sommeil se terminerait ainsi. Elle se calma, m'adressa un sourire et se réinstalla correctement sur le canapé. Comme je ne savais pas si elle avait entendu la première fois, je me répétais :

- Ma chambre est la 4F.

Je ne voulais pas paraître curieuse en lui demandant de quoi elle avait rêvé, pourtant ça me démangeais. Ce n'était pas habituel et je n'aimais pas spécialement cette sensation. Après tout, un rêve c'était, je trouvais, assez personnel.

Après que je me sois installée, Riley-chan répondit à ma question :

- Ma chambre est la 4F.

La 4F était la deuxième chambre après la mienne. En repensant à sa proposition, je me demandai si, après un cauchemar, je pouvais être assez lucide pour m'y retrouver. De plus, nous étions cinq par chambres. Mais, je ne voulais pas me faire plus de soucis. Pourtant, il me restait un certain problème. Les cours. Mais, au lieu d'en pleurer, je me mis à rire. Un rire franc et claire qui dura plusieurs minutes. Lorsque je réussis à me calmer un peu, je fis :

- Mais je ne suis pas possible ! Je repris mon rire avant de m'arrêter, tout en ayant quelques hoquets et le sourire aux lèvres. Gomen, Riley-chan... en fait, je t'avoue passer de mes cauchemars aux cours. Je m'arrêtai un instant pour respirer profondément plusieurs fois et je lui expliquai : Alors que je ne pouvais pas étudier auparavant, maintenant que je découvre beaucoup de choses je suis perdue. Je ne sais pas comment l'expliquer.

Je m'arrêtai pour regarder le plafond. Etait-il si beau que ça que je le regarde si souvent? Non. Mais ça m'aidait à mettre de l'ordre dans mes idées. En fait, ce que je souhaitais dire à Riley-chan était très simple. Et ce que je devais faire très bientôt aussi, d'ailleurs.

- Est-ce que tu voudras bien m'aider à étudier prochainement, s'il te plaît? Parce que, comme j'essayais de te l'expliquer, je ne comprends pas grand chose à ce qu'on nous apprends en cours.

J'espérais que sa réponse soit positive, bien qu'il n'y ait pas de raison qu'elle ne le soit pas.

Elle ne dit rien pendant un instant avant d'éclater de rire. Je restais neutre avant de jeter un coup d'oeil au plafond. Elle l'avait un peu plus tôt dans la conversation et semblait lui trouver quelque chose que je ne m'expliquais pas. Elle éclaira ma lanterne après s'être excusée. Du moins, je supposais que c'était des excuses, Yumiko avait la drôle de manie de mélanger l'anglais et le japonais.

Elle me dit qu'elle ne savait pas trop comment m'expliquer ce qu'elle voulait. Elle réfléchit un instant et regarder le plafond une fois de plus. Qu'est-ce que ce plafond avait de particulier, bon Dieu ?! Elle reprit, apparemment plus sûre de ce qu'elle voulait dire.

- Est-ce que tu voudras bien m'aider à étudier prochainement, s'il te plaît ? Parce que, comme j'essayais de te l'expliquer, je ne comprends pas grand chose à ce qu'on nous apprends en cours.

C'était donc ça. Une sorte de soutien scolaire ? Pourquoi pas. Je n'étais pas la meilleure pour ce rôle puisque j'avais pas mal sécher les cours lorsque j'étais à l'orphelinat mais je n'étais pas la pire non plus; ma moyenne tournant toujours vers les 13/14 sur 20. Je révisais assez souvent bien que j'avais une grande mémoire et malgré mes dessins qui ornaient mes feuilles et cahiers, j'écoutais les cours.

- Quand tu veux. Par contre... les maths... j'ai quelques... pas mal, en fait, de lacunes donc je pourrais ne pas comprendre ce que tu me demandes.

Je n'étais pas vraiment gênée d'exposer ainsi ma faiblesse puisque, pour moi, rien n'était plus important que mon monde, mes quelques amis et mon art. Les mathématiques n'entraient même pas dans la ligne de mire.

Elle parut surprise dans un premier temps en entendant ma requête. Puis, elle me répondit :

- Quand tu veux. Par contre... les maths... j'ai quelques... pas mal, en fait, de lacunes donc je pourrais ne pas comprendre ce que tu me demandes.

Je lui offrit un de mes plus grand sourire tant j'étais ravie. Ce qu'elle me proposait était plus que suffisant. Je ne savais pas à quoi me servirait la matière nommée "les mathématiques" dans l'avenir, mais si Riley-chan m'aidait pour les autres matières, je pouvais bien chercher une autre personne pour celle-là. Cette dernière ne m'était pas désagréable, mais je ne comprenais pas les suites de chiffres, symboles, et, parfois, de lettres qu'on nous donnait à apprendre. Il me semblait avoir raté une étape. Après tout, quand nous avions parlé de "multiplication", je ne savais déjà pas "additionner", ni "soustraire". J'étais peinée d'être la seule à ne pas savoir combien faisaient 2+2. Mais, de toute manière, je pouvais l'avouer, c'était pareil dans TOUTES les matières. Ce qu'il me manquait, avant toute chose, c'était les bases. C'est ce que je répondis à mon amie :

- Si tu as le temps, ce week-end, j'aimerai que nous reprenions les bases dans les matières que tu juge les "plus importantes", s'il te plaît. Parce qu'il me semble que c'est ce qui me fait défaut...

Ma joie était si grande que je ne laissais pas voir la peine que mon retard occasionnait chez moi. Après tout, ce retard allait peut-être comblé dans le temps à venir.

Elle me sourit, un sourire encore plus grand, si c'était possible. Elle semblait heureuse de ma réponse. De toute façon, je ne voyais aucune raison pour refuser. Elle ajouta tout de même, pour m'expliquer ce qu'il fallait d'abord aborder.

- Si tu as le temps, ce week-end, j'aimerai que nous reprenions les bases dans les matières que tu juge les "plus importantes", s'il te plaît. Parce qu'il me semble que c'est ce qui me fait défaut...

Ce week-end ? Aucun problème. Je n'avais rien à faire, et j'allais sûrement m'ennuyer un peu. Les matières les plus importantes... celles que je juge importantes ? Aucune matière ne me semblait réellement importante. Après, d'après ce que j'entendais par-ci par-là, il y avait l'anglais (ils sont en Angleterre après tout), les mathématiques et l'histoire/géographie. Apparemment, les langues vivantes venaient ensuite, puis les sciences physiques, chimiques et naturelles ainsi que la philosophie. Enfin, ce qui était facultatif. Je lui répondis à mon tour :

- Je n'ai pas vraiment de matières importantes. Mais je sais que la plupart de élèves considèrent l'anglais, les maths et l'histoire/géographie comme les trois matières importantes. Je propose qu'on commence par ça ce week-end.